Hier nous étions le 11 novembre, date de l’armistice de la première guerre mondiale, celle de 1914-1918. Cette célébration est maintenant devenue celle de tous les « Morts pour la France », d’hier et d’aujourd’hui.
Il y a de nombreuses façons de mourir, à la guerre, pour son pays. Certaines sont dites glorieuses, certaines sont accidentelles et d’autres sont parfois tellement improbables que leur évocation en devient désespérante.
C’est d’un « Mort pour la France » dont on peut qualifier la disparition d’accidentelle et improbable dont je voudrais vous parler aujourd’hui, lendemain du 11 novembre. Il n’en est pas moins mort, laissant veuve et orphelins.
Émile est né le 21 novembre 1889, il est boulanger et il a épousé Simone le 26 février 1913. En juillet 1914, un peu avant la mobilisation générale du 2 août, les réservistes, maréchaux et boulangers sont convoqués. Il est affecté au 89ème Régiment d’Infanterie, basé près de Juvincourt dans l’Aisne, non loin de Craonne et du Chemin des Dames. Le 19 juin 1917, comme boulanger et réserviste, il est aux cuisines, un peu en arrière du front.
Sur le journal de marche du régiment qu’on trouve sur l’excellent site « Mémoire des Hommes », la journée est calme et toutes les patrouilles sont revenues sans pertes. On signale seulement un violent bombardement du quartier, deux cuisines sont détruites au Bois des Boches, lieu-dit proche de Juvincourt. Certainement un tir d’artillerie un peu trop long, au-delà des tranchées. On déplore 1 tué et 5 blessés, seules pertes de la journée. Malchance !
Émile laisse une veuve, deux filles et un garçon qui disparaitra bientôt de maladie. Simone restera seule jusqu’en 1973 et ses deux filles ont des descendants aujourd’hui. L’aînée deviendra ma grand-mère maternelle. Simone a du batailler pendant des années pour qu’Émile soit reconnu « Mort pour la France », n’étant pas mort au combat. Et pourtant… Il faudra un jugement du 28 décembre 1922 pour qu’Émile soit reconnu « Tué à l’ennemi » et « Mort pour la France ». Une mort « bête » et inutile pourrait-on dire. La guerre ne fait pas de détails !
Pensons à eux, morts et survivants, comme le disait Jacques Brel : « Celui des deux qui reste se retrouve en enfer ».
Lien vers le site « Mémoire des Hommes » : https://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr